Edward Frederic Benson La Terreur dans la nuit

Fantastique

La terreur dans la nuit

Note :
4/5
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L’argument

Ce recueil propose 12 nouvelles parues entre 1912 et 1934 d’Edward Frederic Benson, auteur anglais prolifique. Fantômes terrifiants, personnages machiavéliques et autres diableries sont au rendez-vous, souvent dans une campagne anglaise qui semble des plus agréables…

Ça commence comme ça

Le village de Trevor Major sommeille, solitaire, exilé dans un vallon au nord des downs méridionales qui s’étendent, en direction de l’ouest, depuis Lewes, et forment une parallèle parfaite avec la côté. Il se limite à trois ou quatre dizaines de maisons sans aucune particularité, la plupart ceintes d’un cercle d’arbres. En revanche, la vieille église romane et la manoir, qui se dressent, un peu en-dehors du hameau, appartiennent, de toute évidence, à un passé plus glorieux. Le château, à l’exception d’une période de trois petites semaines (qui remontent à quatre années) était resté inoccupé depuis l’été 1896 et, même si n’importe qui peut le louer pour une somme dérisoire, ridicule même, il semble tout à fait improbable qu’un de ses derniers locataires, même en période de disette, veuille y passer une nuit de plus.
« Le Four à briques », 1912.

Avis personnel

Ces 12 nouvelles sont assez proches des ghost stories traditionnelles qui ont fleuries à l’ère victorienne (l’éditeur propose d’ailleurs plusieurs recueils de ce genre comme Les Fantômes des victoriens). Toutefois, comme nous l’expose Jacques Finné dans sa postface, ces nouvelles présentent quelques originalités qui démarquent l’œuvre fantastique d’EF Benson (il n’écrivit pas que du fantastique) et la rapproche des weird tales, genre où l’on rencontre des auteurs comme Arthur Machen et Lord Dunsany.

Parmi ces originalités, on peut citer la façon dont certains fantômes « apparaissent ». Dans Le Lit près de la fenêtre, le protagoniste, en repos dans une maison d’hôte, perçoit des fantômes du futur puisque s’offre à lui une scène qui ne se produira que plus tard. Egalement, dans la nouvelle éponyme au recueil, le fantôme d’une femme se matérialise accompagné du décor (et de ses manifestations sensorielles) dans lequel la femme est morte.

Les récits d’EF Benson se démarquent aussi en apportant une vision plutôt négative des femmes. En effet, celles qui se trouvent le recueil sont souvent terrifiantes. Dans L’Incendie de la ferme, sur fond de sorcellerie, un homme se retrouve comme prisonnier de sa femme autrefois beauté fatale et maintenant alcoolique descendue au plus bas. Dans La Maison du coin le schéma est le même : un homme est présenté comme malheureux tandis que sa femme apparaît comme monstrueuse. Même si un fantôme intervient, l’horreur est incarnée par cette femme et non par le fantôme ! Il faut citer également Le Fauteuil roulant. Un homme, présenté pourtant comme détestable, apparaît finalement comme une victime face à sa sœur effrayante en tous points. Un tour de force de l’auteur ! Il faut noter que certains s’appuient sur ce fait pour étayer leur thèse d’un EF Benson homosexuel.

« Lovecraft n’est pas loin ». C’est ce que dit la quatrième de couverture. Admirant l’œuvre de l’américain, j’attendais de voir ce qu’il en était. Et bien il est vrai que certains points communs apparaissent : le sentiment d’une horreur sous-jacente et une description détaillée de l’horreur (lorsqu’elle finit par se montrer). Le Visage, ma nouvelle préférée du recueil, le prouve de façon terrifiante. Je citerais aussi Le Four à briques. Même si cette nouvelle reste assez traditionnelle, l’auteur réussit à y développer une malignité prégnante qui se trouve amplifiée lorsque le fantôme apparaît. Je pense aussi à La Maison du coin dont j’ai parlé plus haut et où l’aura de mystère de la femme se transforme en horreur lorsque les protagonistes la voient enfin.

Le père d’EF Benson était un pasteur anglican à vocation « féroce », nous dit Jacques Finné. Aussi, ne s’étonne-t-on pas de souvent retrouver le thème de la religion, mais sous un aspect peu flatteur. Dans Le Sanctuaire, des messes noires sont dévoilées ; dans La Pendaison d’Alfred Wadham, un ecclésiastique dévoile une confession et le diable n’est pas loin…

Ce recueil est donc une bonne surprise. D’une part, parce qu’il met à l’honneur un auteur peu édité en France (pour moi ce fut donc une découverte) et d’autre part, parce qu’une véritable originalité se dégage de ces textes. La Terreur dans la nuit est un livre qui m’a marquée.

Le grain de sable

Lovecraft admirait les récits d’EF Benson.

Gramophone

Le titre Vicarious Redemption de Cult of Luna pose une ambiance inquiétante parfaite.

A propos d’Edward Frederic Benson

EF BensonEdward Frederic Benson est né en 1867 dans le Berkshire. Il connut une histoire familiale compliquée (qui est bien détaillée dans la postface). Avec une centaine de volumes, il fut un auteur prolifique, et certaines de ses œuvres furent des best-sellers. Outre le fantastique, il écrivit des nouvelles et essais, dont un sur Charlotte Brontë.

Références

  • Editions José Corti, Domaine romantique, 2013, 272 pages.
  • Recueil traduit et postfacé par Jacques Finné.
  • Nouvelles parues entre 1912 et 1934.
  • Couverture : The Lorelei de AP Ryder, 1890.

Liens et sources