Chroniquer un disque que j’ai tellement, tellement écouté ces derniers mois me soulage et m’embarrasse. Un peu comme si je dévoilais publiquement une porte directe sur mon jardin secret, ou un petit plaisir musical rien qu’à moi.
Mais The Fool de Warpaint fait définitivement partie des albums lunemauviens : aussi sombre que lumineux, oscillant autour d’une mélancolie latente, et dont chacun des neuf morceaux se déroule telle une lamentation lointaine, bourrée d’étoiles. Je ne pouvais pas taire plus longtemps ce disque sublime.
Warpaint, ce quatuor féminin originaire de Los Angeles, prodigue un rock alternatif lancinant tendance cold wave shootée à la bile noire. Pas d’extravagance, pas de clavier, très peu de sons synthétiques : ici les voix de Emily Kokal et de Theresa Wayman, plaintives, entêtées, entêtantes, n’ont rien de lyrique et planent sur le decorum désertique de l’album comme deux spectres blancs.
La basse, omniprésente, enrichit son rôle rythmique grâce des arpèges chaleureux, qui participent pour beaucoup à la fascinante sensualité du disque, tandis que la guitare délivre des mélodies à tomber (le frissonnant Baby) et incisives (Bees, Shadows).
The Fool est un joli petit tourbillon émotionnel : commencer à l’écouter, c’est prendre le risque de devenir très vite accro. Hypotique, l’album est également très mélancolique. Les paroles évoquent douleurs, absences et torpeur.
Néanmoins, les morceaux sont relativement rythmés, mid-tempo cela va sans dire, et les riffs répétitifs, la production assez brut de pomme, et le chant éthéré font de l’album un rêve éveillé teinté de magie noire.
Quatre petites sorcières qui ont élégamment tissé leur majestueuse toile.
Quatre petites fées recouvrant la Terre d’un rock froid et désertique, qui réussit la prouesse d’allier subtilité à l’enivrement le plus complet.
À ce stade, vous en êtes déjà à la troisième écoute, et le piège se referme sur vous !
Au sein de ce joyeux cauchemar, chaque chanson est un baiser ardent sur une peau froide comme la lune
dixit Samuel Cogrenne sur Discordance. Voilà. Vous m’en direz des nouvelles.
Écouter « Warpaint »
En savoir plus sur Warpaint
- La chronique lyrique de The Fool sur Discordance.
- L’article Wikipedia consacré à l’album, avec un résumé intéressant des critiques qu’il a reçues.
- La chronique de The Fool sur Pitchfork.
- Le site officiel de Warpaint, avec news, bio, photos, clips et boutique !
Même si je m’attendais un peu à aimer ce groupe, juste parce que les sons qu’elles créent ont de quoi évoquer toutes les contrées merveilleuses que mes groupes préférés m’ont fait découvrir, il aura quand même fallu que je prenne un peu de temps pour parvenir à entrer dans cet univers. Peut-être le temps de se laisser surprendre en fait.
Cela ressemble particulièrement à une histoire contemplative, d’atmosphère, d’apparitions langoureuses, « douleurs, absences et torpeur ». Mais rien ne s’engendre dans The Fool sans le mouvement, les rythmes, les frémissements, et surtout l’harmonie de tous ses éléments musicaux.
Merci de ce partage lunemauvien kReEsTaL ! :D
Salut Talulla !
En effet, The Fool ne se dévoile pas du premier coup.
À l’instar du remous des vagues, incessant, il faudra plusieurs écoutes, incessantes, pour parvenir à se laisser entièrement porter par cet océan musical.
Je suis très contente que ma chronique t’ait permis de découvrir ce petit bijou.
Merci pour ton super commentaire, comme d’hab ! \m/^_^\m/
Je ne connaissais pas du tout ! A la première écoute, je trouve ça sympa, sans plus. A la deuxième, je me dis que, quand même, les guitares ont une façon de se poser très belles et bien travaillées. A la troisième, je me dis que je vais écouter encore. Je ne vais pas dire que c’est un coup de coeur – manque peut-être encore des écoutes ^^ – mais j’aime.
Et le clip, lui, je l’adore ! :)
Merci de la découverte !
Déjà, je suis ravie que tu aies pu écouter l’album, et qu’il soit en train de décanter… :)
En effet, ce n’est pas forcément un disque facile d’accès, malgré son classement dans la « pop » (c’est grand, la pop). Je crois que, comme toi, j’ai pénétré dans cet univers de sirènes mélancoliques pas à pas, rechignant un peu au début pour y aller – trop fraîche, l’eau — et puis finalement, hop, je me suis laissée glisser…
Plus moyen de me dépêtrer du chant des naïades depuis, ça s’est greffé à mon ADN.
Tu me diras quand tu en seras à la dix-septième fois ;-)