Tandis que mon blog continue de ressortir dans des recherches Google orientées « girafon » et « Mark Ryden », j’ai été invitée par la Fondation Cartier à découvrir l’exposition Mœbius-Transe-Forme. Et il faut que je vous en parle parce que ça a été de loin l’expo qui m’a le plus fascinée cette année !

Donc Mœbius, aussi connu sous le pseudo de Gir (avec lequel il a signé la série des Blueberry), de son vrai nom Jean Giraud – un monstre de talent et d’expérience, qui à 72 ans manie la palette graphique et Flash comme un jeunot.
La seule fois où j’avais entr’aperçu son œuvre, c’était en 1997, lorsque Le Cinquième Elément est sorti et que c’était soudain devenu le film préféré de ma vie entière. Oui, bon, ça va, j’avais 14 ans. N’empêche que Luc Besson s’était entouré d’une belle brochette d’illustrateurs et de concept artists pour donner naissance à l’univers SF du film, dont Mœbius. Les taxis qui volent, c’est lui. Le vaisseau qui dépose les Mondo-shawans sur Terre, c’est lui aussi.
L’expo en elle-même est conçue autour du thème de la transformation et de la métamorphose (ce qui est déjà très attirant en soi), omniprésentes dans le travail de l’illustrateur. Ce soir-là donc nous étions une petite quinzaine de blogueurs et affiliés [NB : je me compte davantage dans la seconde catégorie]. La visite a commencé par le visionnage du tout premier film d’animation en 3D du maître. A peine 8 minutes de films, et déjà tout un espace-temps qui me séparait de la réalité. Juste fantastique et émouvant, et il faut au moins voir l’expo pour ce film qui est tout bonnement génial ! D’ailleurs, en face de l’écran où il est projeté sont affichées les planches qui ont servi de scénario au film. La finesse des dessins continuait d’ébranler mon émotion.

De là, nous fûmes guidés par une jeune-femme aussi passionnée que passionnante, dont je jalousais secrètement le grand médaillon de nacre accroché autour de son coup. Du minéral, il en est d’ailleurs beaucoup question dans cette expo : Mœbius nourrit, comme pas mal d’artistes, une fixette sur quelques objets et thèmes récurrents qu’il dessine dans son œuvre – les cristaux en font partie. J’ai forcément ressenti beaucoup de sympathie pour l’artiste dès lors que j’ai repéré toutes ces formes géométriques naturelles, tantôt plantées en plein désert, tantôt dissimulées dans un de ses dessins automatiques. Et les personnages de Mœbius sont, eux aussi, aussi beaux qu’étranges, capables de changer de visage en moins de temps qu’il faut pour le dire. A peine le temps de tourner la page…
Au sous-sol de la Fondation Cartier, tout un mur est construit autour de la ligne d’horizon formée par plusieurs pièces originales accrochées les unes à côté des autres. Où homogénéité de son œuvre saute aux yeux, où tous ses personnages surréalistes forment une grande famille un peu barrée. Et le rêve perdure, épinglé tantôt par un cyan intense, tantôt par des ocres chatoyantes. Des formes à la fois animales et minérales sont autant d’adjuvants pour les explorateurs du ciel et de l’espace qui prennent vie à chaque dessin.

En me retournant, et en prenant un peu d’avance sur la présentation de notre guide, je fus saisie par des dessins hauts de 2 mètres 50, deux par deux et habillant majestueusement le mur opposé. Je ne me suis jamais sentie aussi petite ni aussi fascinée. Si vous allez voir l’expo, ne manquez pas le Bestiaire de Mars, qui est une œuvre fabuleuse, minutieuse et absolument ahurissante.
Personne n’est jamais revenu du monde infiniment complexe des rêves infiniment emboîtés.
Évidemment, j’ai été plus sensible aux dessins orientés mondes alternatifs, planètes inconnues et autres déserts intersidéraux, qu’à l’univers western et viril d’un Blueberry. Mais la richesse de l’expo et des travaux présentés laisse là encore la place à libre interprétation ; les formes ne sont pas toujours identifiées, et d’un mur à l’autre ce sont des facettes différentes d’une ouvre singulière, jamais dénuée de second degré, qui étend son pouvoir magnétique.

Arzach de Moebius
A l’étage – celui par lequel l’expo débute normalement -, des dessins originaux, notamment de Blueberry (qui, j’ignorais, a été dessiné d’après Belmondo). Et ce qui m’a le plus impressionnée, c’est sans conteste les traces de tip-ex et les morceaux recollés sur les planches originales – preuve que même nos maîtres retouchent leur travail et ne sont pas forcément satisfaits du premier jet. On croise aussi des autoportraits et des mises en abîme de l’artiste, figé dans le papier, que l’on reconnaîtra toujours grâce à ses chaussures de couleurs différentes.
La visite guidée, nocturne de surcroît, fut très intéressante, surtout quand on connaît mal l’œuvre de Mœbius ou qu’on la découvre comme ce fut mon cas. Les parallèles avec le cinéma – notamment avec Inception pour le concept de rêves imbriqués – et avec la psychanalyse furent nombreux, et m’ont fait réellement plonger derrière le miroir. A peine le temps de remercier nos hôtes que je m’élançais dans la nuit humide de Paris, emportant néanmoins le catalogue de l’expo pour replonger à l’envi dans un univers que je ne suis pas prête d’oublier.
L’exposition Moebius-Transe-Forme se tient jusqu’au 13 mars 2011 à la Fondation Cartier– vous vous en voudriez de la manquer ! :)

Le Starwatcher de Moebius au féminin
Korvus
2 janvier 2011
Je l’ai fait ^^
Pas visiter l’expo, non (mais je le ferais, c’est quasi sur !), mais acheter « l’incal » !
Anne
3 janvier 2011
Ha ça donne envie ! Pas encore eu le temps d’y aller. Avec l’expo SF de La Villette, c’est celle que je voulais voir absolument. Va falloir que je me trouve un créno^^
Merci pour le compte-rendu ;)
Lucille
4 janvier 2011
Tu apprendras que ton blog ressort dans les recherches qui ont pour intitulé « caramel cthulhu chat pipi » ;) J’étais tout de même contente de le retrouver, ça faisait longtemps . Je vais tenter de le mettre dans mes flux RSS histoire de passer un peu plus souvent.
Marie
4 janvier 2011
Salut à tous ^^
@Korvus : ah, pas lu. Tu m’en diras des nouvelles !
@Anne : je t’en prie :) ça vaut vraiment le coup !
@Lucille : welcome back ! ça fait un bail dis donc. Quant à la recherche sus-citée, tu m’expliqueras comment tu t’es retrouvée à taper ça dans Google :-P Sinon oui, s’abonner à mon flux RSS est toujours une bonne idée !
Kyranthia
8 janvier 2011
meilleure expo de quelle année ? parce que tu postes le 2 janvier alors… :p
J’y suis allée vendredi 31 décembre, et je suis restée scotchée sur de nombreuses oeuvres.
Je n’ai pas eu la chance d’avoir une visite guidée mais déjà mes yeux n’en revenaient pas. Je ne crois pas avoir déjà passé autant de temps et pris autant de plaisir à une expo, pour finalement en ressortir les yeux plein d’étincelles, de rêves et cauchemars.
Merci Marie pour cet article des plus intéressants qui donnera, à de nombreuses personnes j’en suis sûre, l’envie d’aller voir cette expo !
Mealin
31 janvier 2011
=) ça m’a donner une envie de bougeotte et comme je passe sur Paris bientôt peut-être que … !
Compte-rendu passionné et passionnant en tout cas ;-)
Marie
1er février 2011
Merci Mealin :) N’hésite pas à me faire part de tes impressions si tu vas voir l’expo.